06/10/2023
Le collège « industriels » de la Commission chargée de l’établissement des barèmes de la rémunération pour copie privée (article L. 311-5 du Code de la propriété intellectuelle) constate à regret la persistance d’une gouvernance déséquilibrée au profit des ayants droit.
Malgré les efforts engagés par le Président de la Commission pour assurer l’équilibre des débats et sa volonté de poursuivre les travaux selon une logique consensuelle, de profondes divergences d’approche entre les différents collèges demeurent. Les ayants droit restent en capacité de bloquer toute proposition d’amélioration du fonctionnement de la Commission, tel que l’illustre le résultat des votes organisés lors de la séance plénière du 6 octobre 2023.
Une nouvelle fois, nous constatons le rejet en bloc par les ayants droit de toute méthode complémentaire aux études d’usages telles que réalisées depuis 2012, malgré des propositions de la part des industriels fondées sur un travail reconnu et en phase avec les recommandations de la mission IGAC-IGF. Cette mission pointait notamment les « dysfonctionnements internes majeurs » fragilisant l’acceptabilité du dispositif actuel1.
L’opposition de principe des ayants droit à la réalisation d’une étude de faisabilité relative à un dispositif d’analyse des terminaux traduit le refus de toute modernisation. Pourtant, les usages en matière de copie ont significativement évolué, considérant en particulier le développement de l’offre légale de streaming sur abonnement pour la musique ou la vidéo. L’étude de faisabilité proposée visait à confronter les résultats de la méthodologie actuelle avec le contenu effectif de terminaux et contrôler ainsi la cohérence de cette méthode.
Les ayants droit savent s’adapter aux nouveaux usages lorsqu’il en va de leur intérêt : des mesures ouvrant la voie à l’assujettissement des copies cloud ont ainsi été adoptées. La FFTélécoms, l’AFNUM et le SECIMAVI ont pourtant chacune à leur tour présenté, dans des délais très restreints, les questionnements techniques et juridiques de l’application du régime de la copie privée dans ce cadre sans que ces dernières ne puissent être traitées au fond par la Commission. Compte tenu des règles de gouvernance en vigueur qui n’assurent pas une représentation équilibrée et paritaire des parties prenantes, dont les dysfonctionnements sont connus, il en résulte à nouveau que les actions mises au vote sont approuvées ou rejetées sous le seul contrôle des ayants droit.
Le marché français fait déjà office d’exception : Copie France a collecté 295 millions d’euros de redevance au titre de la copie privée en 2021, la France représentant ainsi un tiers du montant global versé en Europe au titre de cette redevance. Un tel déséquilibre déstabilise la concurrence sur les marchés des terminaux entre Etats membres. Il ne peut qu’affecter durablement la pertinence et l’acceptabilité des décisions relatives à la rémunération pour copie privée. Il est urgent de rénover ce dispositif inadapté à l’ère du numérique et de l’économie circulaire.
1 https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Rapports/Rapport-du-Gouvernement-au-Parlement-sur-la-remuneration-pour-copie-privee-octobre-2022